Colloque international du 14 décembre 2024
INHA Paris 10.00 – 20.00 « Galerie Colbert » Salle Peiresc
l’accès se fait par le 2 rue Vivienne ou par le 6 rue des Petits-Champs, 75002 Paris
Ce colloque est consacré aux différentes manières dont les références historiques ou politiques ont été convoquées à propos des événements du 7 octobre et, en général, à la façon dont ils ont modifié —ou non— nos façons de penser l’autre, le monde, la politique, la pédagogie[1]. Empan bien large dont les questions mémorielles restent l’entrée privilégiée et à privilégier.
Retrouver l’argumentaire au-dessous du programme.
Programme
Sous la responsabilité de Philippe Mesnard (Université Clermont Auvergne, CELIS EA 4280, Institut universitaire de France, Mémoires en jeu)
10.00 Accueil
10.15-10.45 Philippe Mesnard, Introduction
10.45-13.00 La France et ses démons au miroir du 7 octobre
Modération : Bruno Quélennec
10.45-11.30 Philippe Corcuff (Institut d’Études Politiques, Lyon) Accentuation des dérèglements confusionnistes dans l’après 7 octobre en France, dans le sillage de la compétition entre luttes contre l’antisémitisme et contre l’islamophobie
11.30-12.15 Nicolas Lebourg (CEPEL) Réagir au 7 octobre : un révélateur du marché idéologique des extrêmes droites
12.15-13.00 Martine Leibovici (Univ. Paris Cité, membre du RAAR [Réseau d’action contre l’Antisémitisme et le racisme]) Quel type de régime politique les violences réactives perpétrées par le Hamas le 7 octobre manifestent-elles ?
13.00-14.15 PAUSE
14.15-16.00 Les rapports entre l’Allemagne et Israël sont-ils pris en étau entre la mémoire de la Shoah et son histoire de la colonisation ?
Modération : Philippe Mesnard
14.15-15.00 Bill Niven (Nottingham Trent University) Taboo or not Taboo: Cancel Culture and Silencing in Germany since October 2023
15.00-15.45 Table ronde avec deux interventions de Bruno Quélennec (Paris 8) : Un antisémitisme « mémoriel », « non pas malgré, mais à cause d’Auschwitz » ? Pertinence et limites du concept d’« antisémitisme secondaire » pour penser la judéophobie contemporaine, avant et après le 7 octobre 2023 & d’Olivier Baisez (Paris 8) : De la « querelle des historiens 2.0 » aux controverses post-7-octobre-2023 : retour sur les débats mémoriels allemands
15.45-16.00 PAUSE
16.00-17.15 Quel Israël ? Quelles mémoires ? Quelles marges ?
Modération : Martine Leibovici
16.00-16.45 Shaul Setter (Van Leer Jerusalem Institute) Close Critique in Time of Collapse
16.30-17.30 Table ronde avec deux interventions de Sylvaine Bulle (l’EHESS [LAP-CNRS_EHESS]) Penser Israël après le 7 octobre & d’Albert Herskowicz (co-animateur du RAAR, fondateur de Mémorial 98) La ligne de crête après le 7 octobre : une année de marche au-dessus de l’abîme
17.30-17.45 PAUSE
17.45-19.45 Une pédagogie après le 7 octobre 2023 ?
Modération : Marie-Laure Lepetit
17.45-18.15 Théo Cohen (Univ Lyon 3, Parallel Histories) Enseigner le conflit israélo-palestinien au prisme des mémoires concurrentes
18.15-19.30 Table ronde avec Christian Delage (CNRS, cinéaste), Ina Van Looj (Centre communautaire laïc juif – Bruxelles), Yann Héluc (CPGE, lycée Fermat, Toulouse)
Argumentaire
Avec l’attaque du Hamas, puis la réponse du gouvernement Netanyahou et de l’armée israélienne, , les exactions des nationaux-religieux en Cisjordanie et les violences antisémites et raciales en Europe, il ne s’est pas passé une semaine, parfois une journée, sans que des déclarations ne convoquent un lexique indexé sur les violences historiques de notre modernité, recourant à des associations mémorielles régulièrement abusives, inappropriées ou, du moins, qui auraient exigé une interrogation sur leur justesse et leur adéquation à la réalité. Il en a été ainsi de « génocide », « apartheid », « colonisation », « pogrom », « nazi », « résistance », etc.
Face à la quantité d’énoncés produits et à la diversité des situations d’énonciation, certes, des analyses ont été menées. Mais elles ont souvent été emportées par le mainstream des prises de position —certaines misant sur le scandale qu’elles allaient provoquer—, par des récupérations de toute sorte, ou bien ont été court-circuitées par les émotions que ces événements suscitaient ou par ce qu’ils rappelaient, à tort ou à raison.
Du côté de la gauche radicale, des porte-paroles intellectuels, politiques ou associatifs ont légitimé les crimes du Hamas sclérosant l’alternative d’une pensée émancipatrice de gauche qui, par là même, ne se laisserait pas enfermer dans l’opposition partisane d’un camp contre un autre (le dénommé « campisme »). Alors que l’extrême droite nationale populiste, en quête d’une normalisation de son image, a saisi cette opportunité pour se présenter en protecteur de la communauté juive, alors qu’elle est un des foyers historiques de l’antisémitisme et prône la xénophobie.
Cette journée du 14 décembre prochain rassemble des chercheuses et des chercheurs (sociologie, sciences politiques, philosophie, littérature, histoire), des acteurs culturels et des enseignants du secondaire. Avec distance, sans compromis ni « campisme », il s’agit de se donner pour tâche de faire un état et une analyse de cette situation dans laquelle nous nous retrouvons en étant confrontés à une surproduction de rapprochements où la mémoire historique est omniprésente.
Statut des références mémorielles. Que penser des analogies et des stéréotypes qui ont circulé dans les champs intellectuels et médiatiques ? Quels cadres interprétatifs privilégier ?
Éléments nouveaux. En quoi les prises de position qui se sont révélées à cette occasion ont-elles pris une nouvelle tournure ? ou bien n’ont-elles donné que plus de visibilité à des préjugés résolument ancrés dans nos cultures ?
Rapports mémoriels. Les rapports entre les mémoires respectives de la Shoah et de la colonisation se sont-ils modifiés depuis le 7 octobre ? Comment y situer l’antisémitisme, son histoire et son actualité ? Quels imaginaires sont-ils convoqués ? Il est à ce titre nécessaire de faire un état des lieux du comparatisme, d’autant que cette approche a été réactivée ces dernières années par de virulents débats en Allemagne. Si les questions mémorielles sont un remarquable outil heuristique pour explorer le passé et comprendre le présent, ne peuvent-elles pas également être un écran qui trouble notre rapport aux événements dont on est contemporains ?
Critique. Quels positionnements critiques adopter, avec quels outils, pour mettre à distance les pôles d’attraction partisans et émotionnels, et pour en démonter les mécaniques et les stratégies ? Immergés que l’on peut être dans une situation de mobilisation contre le terrorisme et/ou une situation de guerre, de quelle marge la pensée critique dispose-t-elle ?
Pédagogie. La question de la transmission de ces mémoires des violences historiques radicales occupe depuis des décennies les enseignants et les sciences de l’éducation. Alors que les antagonismes se sont affirmés publiquement, faut-il penser à nouveau la pédagogie de la transmission et comment ? Comment démonter les stéréotypes antisémites ou raciaux dont les suites du 7 octobre se font la chambre d’écho ?
Philippe Mesnard[2]
Par ailleurs… Mémoires en jeu a déjà consacré des projets aux rapports entre mémoire et terrorisme. Le dossier spécial « Mémorialisation immédiates / Spontaneous Memorialization », n°4, septembre 2017 : https://www.memoires-en-jeu.com/dossier/memorialisations-immediates/
[1] Cette initiative s’inscrit à la suite du colloque des 8, 9 et 10 novembre 2023 « Pensées critiques et questions mémorielles » : https://www.memoires-en-jeu.com/dossier/pensees-critiques-et-questions-memorielles/
[2] Professeur des Universités en Littérature comparée. Université Clermont Auvergne (UCA), CELIS EA 4280. Membre senior de l’Institut Universitaire de France promotions 2017-2022, 2022-2027 https://www.iufrance.fr/les-membres-de-liuf/membre/1791-philippe-mesnard.html Directeur de Mémoires en jeu : www.memoires-en-jeu.com